Une gouvernance en panne
Le bilan du président de la RDC, caractérisé par une fréquence étonnante de voyages à l'étranger, illustre une absence flagrante d'ancrage et d'impact dans la gestion nationale. En six années au pouvoir, aucune réforme majeure n'a permis d'inverser la tendance d'un système défaillant.
Cette fuite en avant s'accompagne d'une incapacité à unifier le paysage politique, comme en témoigne l'Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS), un parti politique à la fois historique et emblématique dans la quête de la démocratie en République Démocratique du Congo, se trouve aujourd'hui pris dans les méandres d'une direction bicéphale, déchirée par des objectifs souvent contradictoires.
L'équilibre fragile entre les différentes factions qui composent ce mouvement, jadis porteur d'espoirs et de promesses de changement, semble s'effriter jour après jour. Au cur de cette division, les orientations stratégiques du parti se voient de plus en plus marquées par des divergences internes, rendant difficile toute avancée harmonieuse.
Cette situation d'impasse frappe particulièrement le leadership, qui se trouve incapable de répondre de manière cohérente aux attentes populaires. Alors que la vision du renouveau était au centre de son programme, elle semble aujourd'hui se diluer dans un brouillard politique épais, incapable d'offrir des solutions tangibles face aux défis du pays.
La coalition de l'Union sacrée, qui avait naguère constitué une promesse de renouveau pour la République Démocratique du Congo, n'échappe pas à cette dynamique de délitement.
Portée par des aspirations communes, elle se transforme aujourd'hui en un assemblage fragile d'alliances instables, où chaque acteur semble tirer la couverture à soi, parfois au détriment de l'intérêt général. Cette fragmentation engendre un sentiment de leadership impuissant, voire d'inaction, dans un contexte où la population, de plus en plus lasse, attend des résultats concrets et une direction claire qui peinent a arriver.
En dépit des discours réitérés sur la réconciliation et l'unité nationale, les dissensions internes et l'incapacité de maintenir une ligne de conduite cohérente ne font que renforcer le scepticisme à l'égard du projet politique qui avait été initialement perçu comme porteur de changement et de progrès.
Une crise étendue aux institutions
La gravité de la crise politique et sécuritaire qui secoue la République Démocratique du Congo a contraint l'ex-Président Joseph Kabila à sortir de son mutisme, marquant ainsi un tournant décisif dans la scène politique du pays. Dans une prise de position sans équivoque, il a choisi de s'allier publiquement avec Moïse Katumbi, une figure emblématique de l'opposition, dans un communiqué d'une rare virulence. Ce dernier vise à dénoncer fermement le projet de révision constitutionnelle, qu'ils considèrent comme une manuvre funeste visant à prolonger indéfiniment les mandats au détriment de la démocratie et du bien-être du peuple congolais.
Dans ce communiqué, Kabila et Katumbi mettent en lumière les dangers imminents que comporte une telle révision constitutionnelle, et ce, au nom d'une volonté populaire d'instaurer un régime stable, républicain et respectueux des principes démocratiques. Ils appellent ainsi à une résistance collective, fustigeant les dérives autoritaires qui, selon eux, menacent l'intégrité de l'État et le vivre-ensemble national. Par cet acte, l'ancien Président entend affirmer son rôle de garant des institutions et de la constitution, tout en consolidant son alliance stratégique avec l'opposition, une alliance jugée nécessaire face aux défis politiques et sécuritaires qui secouent la nation.
Les institutions religieuses, qui ont jadis joué un rôle primordial de médiatrices dans les conflits et de pourvoyeuses des services sociaux essentiels, se trouvent aujourd'hui dans une posture radicalement opposée à celle qu'elles occupaient autrefois.
Autrefois perçues comme des acteurs de réconciliation, elles exercent désormais une critique acerbe et résolue du pouvoir en place, dénonçant ouvertement les dérives et les injustices qui gangrènent la gouvernance actuelle. Cette mutation de leur rôle témoigne non seulement de l'évolution des rapports entre le clergé et les autorités, mais aussi de l'intensification des tensions sociopolitiques, où même les bastions traditionnels de l'ordre moral et social se sentent contraints de remettre en question l'ordre établi.
Ce revirement marque un point de non-retour dans l'évolution des dynamiques de pouvoir, un signe incontestable que la situation est d'une gravité extrême.
Ce changement de posture des institutions religieuses révèle une profonde fracture dans la société, mettant en lumière l'ampleur du malaise général. Les clercs, sont désormais devenus des voix dissidentes, interpellant l'opinion publique sur les dérives autoritaires et l'inefficacité des gouvernements. Ce phénomène n'est pas simplement le signe d'un désaveu de l'exécutif, mais plutôt celui d'un rejet total des fondements mêmes du système politique en place.
Loin de se limiter à des critiques isolées, les interventions des institutions religieuses prennent la forme d'un véritable appel à la conscience collective, un avertissement solennel sur l'urgence de restaurer les principes de justice, de transparence et de respect des droits humains.
Il est indéniable que l'atmosphère actuelle, marquée par un climat de contestation et de défiance, laisse présager des changements d'une ampleur considérable dans les mois à venir. La société, traversée par des tensions palpables et des remises en question profondes, semble se trouver à la croisée des chemins.
Les voix dissonantes se multiplient, l'incompréhension s'intensifie, et une fracture se dessine entre les aspirations populaires et les décisions des élites. Cette situation tumultueuse augure de bouleversements qui pourraient redéfinir non seulement le paysage politique, mais aussi la structure même de nos institutions sociales et économiques.
Les événements à venir risquent de réécrire les règles du jeu, imposant une réévaluation de nos principes et de nos priorités. Cette opposition traduit une perte de confiance globale, alors que le ministre de la Justice rétablit la peine de mort, une mesure controversée qui révèle un manque de vision dans un contexte d'état de droit fragilisé.
L'appel à la prière pour pallier l'échec de la gouvernance illustre le vide de solutions concrètes et stratégiques.
L'insécurité et le chaos militaire
Sur le front militaire, les Forces Armées de la RDC (FARDC) subissent des revers systématiques face au M23, un mouvement rebelle qui consolide son emprise sur les territoires stratégiques de Lubero, Rutshuru, Masisi et progresse maintenant vers le Sud-Kivu en direction de Katana.
Cette avancée met en lumière l'incapacité de l'état à protéger son intégrité territoriale et à garantir la sécurité de ses citoyens. Pendant ce temps, la corruption, érigée en sport national, gangrène les efforts de reconstruction et alimente une impunité qui paralyse les initiatives positives.
Une population laissée-pour-compte
La population congolaise, paupérisée par une économie en ruine, subit de plein fouet les conséquences de cette gestion désastreuse. Les infrastructures essentielles, telles que la santé et l'éducation, se délitent dans l'indifférence, tandis que l'absence de politiques sociales renforcées creuse davantage les inégalités. Ce découragement généralisé mine l'espoir de relance et favorise l'exode des talents vers des horizons plus prometteurs.
Le silence des partenaires internationaux
Dans ce tableau sombre, l'inaction apparente des partenaires internationaux pose question. Malgré leur responsabilité morale et politique, ces acteurs semblent se contenter d'une posture passive, sans initiatives audacieuses pour prévenir l'effondrement imminent de la RDC.
Laisser ce pays, dont la position stratégique est d'une importance capitale, se précipiter dans le chaos constituerait un affront aux équilibres régionaux et internationaux, avec des répercussions d'une gravité inouïe. Les signaux d'alarme, désormais flagrants et incontestables, sont visibles à l'échelle mondiale, et prétendre ignorer l'imminence du péril serait un déni de réalité.
Chacun des développements de la situation actuelle, chaque avertissement, est une manifestation indiscutable de la profondeur du
gouffre dans lequel ce pays risque de sombrer. L'inaction face à une telle dérive, au nom de l'indifférence ou de l'inaudible indécision, équivaudrait à une abdication de responsabilité, avec des conséquences qui résonneraient bien au-delà des frontières immédiates.
Le monde ne saurait feindre l'ignorance lorsque l'évidence du danger est éclatante, et chaque minute d'attente risque de rendre le prix de l'immobilisme encore plus insupportable.
Tite Gatabazi
Source : https://fr.igihe.com/La-RDC-au-bord-du-gouffre.html