
NDAHO
À ma chère maman que j'aime tant,
Je suis devenue parent comme toi. La dernière fois qu'on s'est vues, c'était à cette date, lorsque nous étions emmenées. Tu me disais de rester avec vous, pour qu'on meure ensemble. Sois sans crainte, j'ai survécu ; je suis maman comme toi, et tu as maintenant deux petits-enfants.
Je me rappelle souvent de ta beauté. Maintenant que je suis maman, je réalise le travail que tu as accompli en nous élevant, et cela me donne beaucoup de courage. Mais sois sans crainte, je le fais aussi bien que toi.
Ta petite fille aînée va bientôt avoir 16 ans ; elle s'appelle Chriane, c'est une jeune fille souriante. L'autre petit enfant, un très beau garçon rempli d'amour et de force, s'appelle Kyle. Il a 6 ans et commence à me demander : "Est-ce que ta maman vit au Rwanda, pour que j'aille lui rendre visite ?" Je lui réponds que tu habites au ciel. Je t'aime toujours très fort.
À mon cher papa, que j'aime tant, un héros pour moi, tu t'es battu pour nous protéger ; tu as essayé de nous cacher. Ça n'a pas été possible que tout le monde survive, mais tu as emporté la victoire car je suis en vie.
Je me rappelle souvent de ton amour, ta voix ne quitte jamais ma mémoire. Tu voulais que je devienne médecin ; ce n'est pas ce que je suis devenue, mais j'ai essayé d'étudier autant que je le pouvais. Je t'avais dit que j'allais devenir sur pour aider les gens, et toi, tu me disais que ce n'était pas nécessaire de devenir sur pour aider. Et voilà, je suis devenue une dame avec deux enfants. Maintenant, tu es grand-père de deux petits-enfants. Quand ils grandiront, je leur dirai que tu es un héros. Je t'aime toujours.
Ma sur Antoinette, tu étais belle, appréciée par tout le monde. Je ne pensais pas qu'on pouvait te tuer. Je m'imagine souvent la fille que tu allais devenir ; je vois en toi que de bonnes choses. Maintenant, tu es tante ; j'essaie d'imaginer la vie que j'aurais eue en ta présence, les secrets qu'on aurait partagés. Je m'arrête ici, je t'aime tant et j'ai beaucoup de souvenirs de toi.
À mes frères Adolphe, Innocent et Straton, je m'imagine la vie que j'aurais eue si vous étiez là en tant que frères. Mes enfants vous appellent "tonton", quelle joie cela aurait été ! Vous êtes partis trop tôt. Je m'imagine que maintenant, vous auriez des copines, seriez mariés, ou auriez des enfants, et moi, je serais "tante". Quelles belles choses j'ai perdues, mais je vois en vous de belles qualités. Vous seriez devenus des hommes de valeur, mes enfants venant chez vous, vous promenant avec eux ; cela aurait été tellement précieux. Je me souviens de vous et je vous aime toujours.
À toi notre cadette (bébé), je compte les années et constate que tu aurais eu 31 ans. Je pense que tu serais devenue une belle jeune fille. Je vois en toi de belles qualités. Nous n'avons pas été ensemble longtemps, mais je me réjouis de t'avoir connue. Je te considère comme une héroïne qui a vécu. Je t'aime.
Mes chers parents, mes chers frères et surs, je vais bien, j'ai survécu, j'apprécie la vie ! Est-ce qu'elle est facile ? NON, mais j'apprends à marcher, à avancer, à tomber et à me relever. J'apprends à me retourner régulièrement et à admirer le chemin parcouru, accompagnée par Dieu à chaque étape.
Oui, parfois, je me sens seule et abandonnée, mais ma vie est une succession de rebondissements, d'événements heureux et d'autres plus difficiles. Je suis une femme ordinaire pour qui Dieu a un plan extraordinaire. NDAHO.

Diane Uwineza