L'Akazu : le cercle occulte de Habyarimana impliqué dans le trafic illicite de stupéfiants #rwanda #RwOT

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Les activités de l'Akazu, en particulier sa participation à la planification et à l'exécution du génocide contre les Tutsi, ont atteint leur apogée avec sa contribution directe à ce crime contre l'humanité.

Cependant, au-delà de ce que le grand public sait, l'Akazu était également impliqué dans d'autres activités illicites, notamment le trafic de drogues. Dans son ouvrage "Stepp'd in Blood : Akazu and the Architects of the Rwandan Genocide Against the Tutsi" (Enfoncés dans le sang : l'Akazu et les architectes du génocide contre les Tutsi), l'auteur Andrew Wallis revient notamment sur le trafic de cocaïne auquel se livrait ce réseau.

Wallis explore également plusieurs épisodes clés de l'histoire du Rwanda, notamment les circonstances mystérieuses entourant la mort de la célèbre primatologue américaine Dian Fossey, surnommée "Nyiramacibiri", reconnue pour ses recherches sur les gorilles de montagne dans la région de Kinigi.

L'auteur avance l'hypothèse que la mort de Fossey pourrait avoir été orchestrée par des figures influentes du régime de Habyarimana, dont le président lui-même, son épouse Agathe Kanziga, et son beau-frère Protais Zigiranyirazo, alors gouverneur de la préfecture de Ruhengeri.

Le mobile ? Fossey aurait découvert leurs activités illicites, notamment l'utilisation de la région des Volcans comme corridor pour le trafic de cocaïne, de pierres précieuses, ainsi que de gorilles vivants ou de leurs parties, acheminés principalement vers Paris. Il convient de souligner que les présidents Habyarimana et François Mitterrand entretenaient à l'époque une relation particulièrement étroite.

La mort de Dian Fossey pourrait avoir été orchestrée par des figures influentes du régime de Habyarimana

Le clan Kanziga, ses proches et alliés contrôlaient presque toutes les décisions gouvernementales, ainsi que l'économie et les ressources nationales, principalement entre les années 1980 et 1994, jusqu'à la libération du pays par le Front patriotique rwandais (FPR).

Le parc national des Volcans, reconnu pour être l'habitat des gorilles de montagne, une espèce rare et protégée, était devenu un centre névralgique des activités illicites de l'Akazu.

Ce parc servait de corridor pour le trafic de pierres précieuses, notamment l'or, et la cocaïne. Selon l'auteur, la drogue, en provenance du Guatemala (Amérique centrale), transitait par la Côte d'Ivoire, arrivait au Rwanda, puis était remise à un homme d'affaires belge originaire de Rhode-Saint-Genèse.

Cet homme, qui gérait un marché de distribution d'antennes paraboliques pour les télécommunications et la télévision au Rwanda ainsi que dans d'autres pays d'Afrique de l'Est, jouait un rôle central dans le trafic de drogue, facilitant son acheminement via le parc des Volcans jusqu'en France.

Le commerce des antennes paraboliques servait de façade pour cet homme d'affaires, lui permettant de blanchir l'argent provenant de ses activités illégales en collaboration avec l'Akazu.

Jean-Pierre Habyarimana, le fils du président, aurait introduit au Rwanda un certain Mamadou Barry, originaire de Guinée et âgé de 22 ans à l'époque. Après plusieurs échecs commerciaux au Gabon et en Côte d'Ivoire, Barry devint proche d'Agathe Kanziga, qu'il assistait dans divers projets.

Barry lança alors une initiative visant à redorer l'image du pays, ternie par la mort suspecte de Dian Fossey. Avec Jean-Pierre Habyarimana, il conçut un projet intitulé " International Fair for the Protection of Gorillas in Rwanda ", un événement qui devait attirer des célébrités, dont Miriam Makeba, bien qu'elle ne participât finalement pas.

Cependant, cette initiative ne se déroula pas comme prévu. Le journal " Isibo " publia une satire acerbe à l'encontre de Jean-Pierre Habyarimana, avec un titre moqueur : " Habyarimana Jean-Pierre récidive : celui qui tua une pintade avec son aisselle continue d'en faire étalage. "

Même Christophe Mfizi, alors directeur général de l'ORINFOR, dénonça publiquement le gaspillage des ressources de l'État dans ce projet censé générer des revenus grâce à des partenariats privés.

Plus tard, le ministre des Affaires étrangères, Casimir Bizimungu, accusa Barry d'avoir détourné plus d'un million de dollars.

Des révélations sur Barry surgirent lorsqu'il adressa une lettre ouverte au président Habyarimana, dans laquelle il affirmait qu'un haut responsable l'avait contraint à charger de la cocaïne à bord d'un avion privé affrété par une société européenne, supposé transporter des experts étrangers au Rwanda.

Dans cette lettre, Barry désigna Twahirwa Séraphin, cousin d'Agathe Kanziga, comme l'un des principaux instigateurs de l'opération. Ce dernier, responsable financier de l'événement, aurait promis à Barry 50 000 dollars américains pour chaque cargaison de drogue transportée.

Twahirwa nia toute implication dans l'affaire. Toutefois, Barry fut accueilli à Kigali, logé pendant une semaine à l'hôtel Méridien aux frais de l'État, pour un montant de 5 000 dollars.

Les médias gouvernementaux reçurent ensuite l'ordre de réhabiliter l'image de Barry, accusé de détournement de fonds. Peu après, il repartit aux États-Unis avec, selon l'auteur, une valise contenant environ 400 000 dollars en espèces, secret qu'il aurait partagé avec Jean-Pierre Habyarimana.

Le journaliste de Jeune Afrique qui enquêtait sur cette affaire â€" y compris sur la tombola organisée lors de l'événement, censée offrir cinq millions de francs rwandais au gagnant â€" fut expulsé du pays pour avoir tenté de poursuivre ses investigations.

Wallis soutient que la préfecture de Ruhengeri, dirigée par Protais Zigiranyirazo, fonctionnait comme un véritable État dans l'État. Elle servait de plateforme pour des trafics illicites entre le Zaïre (aujourd'hui la RDC) et l'Europe.

La préfecture de Ruhengeri, dirigée par Protais Zigiranyirazo, fonctionnait comme un véritable État dans l'État

La chercheuse Dian Fossey, opposée à l'exploitation commerciale du parc, souhaitait en faire un centre de recherche scientifique. C'est ainsi qu'elle serait devenue une cible pour ceux qui cherchaient à s'enrichir en exploitant les espèces protégées.

Un bébé gorille pouvait se vendre jusqu'à 30 000 dollars. Les mains, la tête ou les pieds de gorilles étaient également très recherchés et se vendaient séparément à prix élevé.

Pendant ce temps, la population rwandaise, plongée dans la pauvreté, souffrait gravement de manque de ressources de première nécessité.

Un autre commerce illicite impliquant l'Akazu concernait le bambou, une ressource essentielle pour les gorilles. Protais Zigiranyirazo aurait exploité cette ressource à des fins lucratives.

Lorsque Christophe Mfizi prit connaissance de cette situation, il chargea un journaliste d'enquêter. Les résultats de cette enquête devaient être publiés dans le journal " Imvaho ". Toutefois, avant la parution de l'article, Augustin Nduwayezu, chef des renseignements, intervint pour exiger sa suppression, à la demande explicite de Zigiranyirazo.

" Sans détour, il me demanda de retirer cet article concernant le traffic de bambou. Il m'expliqua clairement que la demande venait de Protais Zigiranyirazo, mais je n'y prêtai guère attention, bien que nous ayons été menacés, le journaliste et moi. " déclara Mfizi.

Refusant de céder à la pression, Mfizi écrivit directement au président Habyarimana pour l'informer de son intention de ne pas supprimer l'article, sauf instruction contraire de sa part. Il suppose cependant que sa lettre n'est jamais parvenu au président, ayant probablement été interceptée par le colonel Elie Sagatwa, bras droit de Zigiranyirazo.

" Je n'ai jamais reçu de réponse. Je ne sais pas si le président a vu ma lettre ou si elle a été bloquée par Sagatwa, qui cherchait à protéger son beau-frère Zigiranyirazo et Nduwayezu ", précisa Mfizi.

À cette époque, la corruption, le népotisme, le favoritisme et un climat de peur régnaient sur le Rwanda. Nombreux sont ceux qui ont perdu la vie en tentant de dénoncer ces abus ou simplement pour avoir été témoins des agissements de l'Akazu.

Nombreux sont ceux qui ont perdu la vie en tentant de dénoncer les abus de l'Akazu

Alain Bertrand Tunezerwe



Source : https://fr.igihe.com/L-Akazu-le-cercle-occulte-d-Habyarimana-implique-dans-le-trafic-illicite-de.html

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