Les déclarations successives du président Félix Tshisekedi, examinées dans leur enchaînement et confrontées à la réalité des faits, dessinent bien moins la trajectoire d'un chef d'État mû par une vision stratégique cohérente que le portrait d'un président constamment ballotté entre effets d'annonce spectaculaires, reniements répétés et dérobades rhétoriques, au point que la parole publique, au lieu d'éclairer l'action et d'en garantir la continuité, finit par se dissoudre dans l'inconstance et la contradiction.
" J'irai m'installer à Goma ", affirmait-il avec emphase, avant de se raviser : " Je n'ai pas besoin d'aller habiter à Goma pour agir ".
" J'ai trouvé une armée structurée ", disait-il hier, pour déclarer aujourd'hui : " J'ai trouvé une armée de clochards ".
" Nous allons créer six millions d'emplois pour les jeunes ", promettait-il, avant d'admettre que " l'État ne fournit pas d'emplois aux jeunes ".
A ces contradictions internes s'ajoutent celles de la politique régionale : reconnaître que " depuis Goma, il est possible d'atteindre Kigali ", tout en soutenant n'avoir " jamais eu d'attitude belliqueuse envers le Rwanda ".
Ces inconstances, loin de constituer de simples incidents anecdotiques, s'érigent en véritables fissures au sein de la parole présidentielle, en compromettant gravement sa cohérence et en érodant la confiance que la nation est en droit d'accorder à son chef.
Elles transforment l'autorité du Président en un miroir fracturé, où chaque volte-face ou reniement successif vient altérer non seulement la perception de la légitimité du pouvoir, mais aussi la capacité même du président à incarner la continuité, la rigueur et la responsabilité inhérentes à sa fonction.
Gouverner, ce n'est pas juxtaposer des slogans contradictoires au gré des circonstances ou de l'auditoire ; c'est inscrire l'action publique dans une ligne intelligible, assumée et durable.
Lorsqu'un président célèbre une armée pour la vouer ensuite à l'opprobre, il ne se contente pas d'un changement de ton : il délégitime l'institution dont il est constitutionnellement le chef suprême.
Lorsqu'il promet des millions d'emplois avant d'affirmer que l'État n'a pas vocation à en créer, il révèle moins une évolution doctrinale qu'un profond désarroi conceptuel. La parole présidentielle, ainsi disloquée, cesse d'éclairer l'action et devient un instrument de confusion.
Cette incohérence se double d'une fuite permanente devant la responsabilité. En imputant à l'armée ce qu'il reconnaissait naguère comme un héritage structuré, le Président cherche à se décharger de ses propres échecs.
En invoquant tour à tour la fermeté et l'apaisement vis-à-vis des voisins, sans ligne diplomatique lisible, il entretient une ambiguïté dangereuse pour la stabilité régionale. Or, l'autorité d'un chef d'État ne se mesure pas à la virulence des formules, mais à la capacité de tenir un cap, d'assumer les choix opérés et d'en répondre devant la nation.
En définitive, ces volte-face répétées traduisent une carence plus grave qu'une simple maladresse communicationnelle : elles révèlent l'incapacité à assumer pleinement les charges et les devoirs de la magistrature suprême.
Un président de la République ne saurait conjuguer simultanément le rôle d'orateur de l'instant et celui de fossoyeur de sa propre parole, car une telle dissonance trahit l'incapacité à assumer la continuité et la solennité de la fonction présidentielle.
Or, c'est précisément ce qui se produit avec le président Tshisekedi, dont le génie autoproclamé se trouve ridiculisé aux yeux d'un auditoire national et international, exposant la RDC au regard critique des observateurs étrangers et compromettant la crédibilité même de l'institution qu'il est censé incarner.
Cette contradiction manifeste entre la forme et le fond de son discours illustre avec éclat les limites d'un Président dont la parole vacille et se fragilise face aux attentes et à la perception du monde.
La constance n'est pas une option accessoire du pouvoir ; elle en est la condition de légitimité. Faute de l'avoir comprise et incarnée, le Président s'expose à ce discrédit durable qui frappe les gouvernances sans boussole, où l'inconstance devient, hélas, la seule ligne politique perceptible.
Tite Gatabazi
Source : https://fr.igihe.com/Les-inconstances-du-President-Tshisekedi.html