
Cette interrogation trouve aujourd'hui une première réponse, alors que les dirigeants européens s'apprêtent à officialiser, ce jeudi 4 septembre, un engagement collectif auprès de Kiev, à l'issue d'un échange en visioconférence entre Volodymyr Zelensky et ses partenaires, réuni depuis l'Élysée.
La veille, Emmanuel Macron avait déjà donné le ton en recevant le président ukrainien à Paris. Le président français a réaffirmé la détermination des membres de la " coalition des volontaires " regroupant une trentaine de nations, principalement européennes à endosser, le moment venu, des garanties de sécurité au profit de l'Ukraine et de son peuple, une fois un accord de paix signé.
" Le travail de préparation est achevé, nous sommes prêts à une paix robuste et durable ", a-t-il martelé, tout en posant la question de la sincérité de Moscou dans ses offres de cessez-le-feu adressées aux Américains.
Zelensky, pour sa part, s'est montré beaucoup moins enclin à l'optimisme, constatant l'absence de tout signe tangible de bonne foi du côté russe. Le Kremlin, de son côté, s'est empressé de dénoncer ces perspectives, jugeant que les garanties recherchées par Kiev constitueraient en réalité une menace pour l'équilibre du continent européen.
Une architecture de sécurité en construction
Mais quelles sont ces garanties ? La première, qui fait consensus parmi les alliés de Kiev, consiste à assurer la consolidation durable des forces armées ukrainiennes, à travers un soutien matériel, logistique et financier. Il s'agit de garantir, dans la durée, la capacité de l'Ukraine à défendre son intégrité et à dissuader toute velléité de réinvasion.
La seconde, beaucoup plus délicate, serait l'envoi de contingents européens sur le sol ukrainien. La France, notamment, n'a pas exclu une telle hypothèse, qui se traduirait par le déploiement de quelques milliers d'hommes. Il ne serait nullement question de troupes en première ligne, mais plutôt de missions d'appui, de formation ou de déminage, positionnées loin du front. Leur valeur résiderait avant tout dans leur portée symbolique : car si Moscou venait à relancer les hostilités en présence de soldats européens, cela équivaudrait à une déclaration de guerre directe contre l'Europe.
Ce scénario demeure cependant semé d'embûches. Certains partenaires, tels que l'Italie, y sont fermement opposés, et la prudence reste de mise pour ne pas fermer prématurément la porte à d'éventuelles négociations avec la Russie. Le Kremlin, d'ailleurs, a déjà fait savoir son hostilité à toute présence militaire occidentale sur le sol ukrainien.
Le rôle cardinal de Washington
À ces deux volets s'ajoute une troisième dimension, jugée essentielle par Paris comme par d'autres capitales : l'apport d'un " filet de sécurité " américain. Cette garantie consisterait en un appui logistique, en un partage renforcé de renseignements stratégiques, ou encore en une coopération accrue dans le domaine des communications. En somme, il s'agirait d'un gage de solidité transatlantique sans lequel l'engagement européen manquerait de colonne vertébrale.
C'est pourquoi Emmanuel Macron devait s'entretenir, ce jeudi après-midi, avec Donald Trump, entre la réunion de la coalition le matin et la conférence de presse prévue à l'issue des travaux. Le président américain, qui s'entretiendra également avec son homologue ukrainien dans la journée, sera appelé à clarifier l'étendue du soutien des États-Unis à ce nouvel édifice de sécurité en gestation.
Une étape décisive mais fragile
Au fond, l'Europe se trouve à un carrefour. D'un côté, elle affiche sa volonté de bâtir, aux côtés de Kiev, un dispositif de sécurité pérenne, qui permette d'ancrer l'Ukraine dans une paix consolidée. De l'autre, elle avance avec prudence pour ne pas précipiter un affrontement direct avec Moscou. Entre ambition et prudence, volontarisme et calcul stratégique, le chemin s'annonce étroit.
L'histoire retiendra sans doute ce moment comme l'un des premiers jalons d'une réinvention de la sécurité européenne. Mais il reste à savoir si ces garanties, aussi ambitieuses soient-elles, pourront réellement se transformer en rempart contre la brutalité des faits accomplis par la Russie.

Tite Gatabazi
Source : https://fr.igihe.com/L-Europe-face-a-l-epreuve-des-garanties-de-securite-a-l-Ukraine.html