Déployant près de cent cinquante hommes lourdement armés contre un domicile privé, l'appareil d'État a révélé, une fois encore, les stigmates d'un régime qui, faute de légitimité véritable, s'enferme dans la paranoïa et la répression aveugle. L'arrestation arbitraire des neuf gardes chargés de la protection des lieux, conduits vers une destination inconnue, illustre le mépris systématique des droits fondamentaux et l'institutionnalisation d'une logique d'intimidation.
Ces méthodes, qui rappellent les sombres heures des régimes autoritaires, sont bien plus que des faits divers sécuritaires : elles traduisent un effritement de l'État de droit et une inversion profonde des valeurs républicaines. L'autorité, censée se fonder sur la légalité et la confiance du peuple, se mue en un pouvoir qui se nourrit de la peur et de la haine de l'autre, cherchant dans la stigmatisation et la brutalité la justification de sa propre existence. Ce renversement des fondements éthiques et politiques constitue désormais la marque déposée d'un régime qui, incapable de rassembler, préfère persécuter.
Loin de raffermir son assise, cette stratégie d'étouffement fragilise davantage le pouvoir, révélant à la face du monde sa faiblesse intrinsèque. Car un gouvernement qui en vient à considérer ses opposants ou ses anciens alliés comme des ennemis intérieurs à neutraliser ne démontre pas sa force, mais son incapacité à s'ancrer dans une légitimité durable.
Le recours systématique à la coercition, l'usage disproportionné de la force publique et la criminalisation des voix dissidentes ne font que creuser le fossé entre l'État et la société, transformant chaque acte d'intimidation en nouvelle fracture nationale.
En réalité, la RDC s'enfonce dans une spirale où l'exercice du pouvoir se confond avec la gestion des peurs imaginaires. Cette paranoïa institutionnalisée, loin de protéger la nation, contribue à l'isoler davantage, à étouffer ses énergies vives et à dénaturer son avenir. Dans cette logique, la persécution devient le substitut de la politique, et la violence, l'ultime langage d'un pouvoir en quête d'assise.
La démocratie congolaise, encore fragile et souvent instrumentalisée, se trouve ainsi en péril. Car il est une loi immuable de l'histoire : tout régime qui choisit la voie de l'arbitraire au détriment de la justice et de la vérité finit tôt ou tard par être emporté par le désaveu des peuples et par le jugement de l'histoire.
Le destin du Congo ne peut se réduire à ce cycle d'aveuglement et de brutalité ; il doit retrouver la voie de la légalité, de l'inclusion et de la dignité humaine, sans quoi la République restera prisonnière de ses propres fantômes.
Tite Gatabazi
Source : https://fr.igihe.com/La-Republique-en-otage-ou-la-paranoia-tient-lieu-de-gouvernance.html