La paranoïa et la dérive répressive au sommet du pouvoir congolais #rwanda #RwOT

webrwanda
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Loin d'apparaître comme l'expression d'une justice sereine, ces vagues d'arrestations traduisent plutôt la fébrilité d'un pouvoir ébranlé, qui dans sa perte de vitesse entraîne avec lui les serviteurs mêmes de l'État. La suspicion est devenue la matrice du régime : à mesure que l'autorité présidentielle s'affaiblit, la peur se déploie comme un voile ténébreux sur toutes les sphères du commandement militaire.

Au sommet de l'État, la paranoïa prend désormais des allures d'obsession pathologique. Chaque officier swahiliphone est perçu non comme un loyal défenseur de la patrie, mais comme un conspirateur potentiel, un acteur d'ombre tramant un coup d'État hypothétique. Dans cet imaginaire du soupçon, la loyauté ne se prouve plus par les faits, mais par la docilité absolue à l'égard du chef, tandis que la moindre divergence devient l'indice d'une trahison à venir.

Ainsi, les procès se multiplient, expéditifs, drapés dans l'apparence d'une justice implacable mais vidés de leur substance juridique. Quinze années de réclusion criminelle, sans circonstances atténuantes et assorties de destitution, sont requises contre des officiers supérieurs, non pas au terme d'une instruction impartiale, mais dans le cadre d'un théâtre judiciaire destiné à apaiser les angoisses d'un président prisonnier de ses propres phobies.

Cette mécanique répressive trouve un écho saisissant dans les pages sombres de l'histoire congolaise. Sous Mobutu Sese Seko déjà, la peur du coup d'État avait engendré une succession de purges militaires qui décapitèrent l'armée et alimentèrent une atmosphère de suspicion généralisée. Le " Léopard de Kawele ", obsédé par le spectre de la trahison, voyait en chaque officier de talent un rival en puissance. Comme lui, Félix Tshisekedi semble désormais emprunter cette voie périlleuse, où le chef d'État, hanté par la hantise de sa propre chute, s'acharne à neutraliser ceux-là mêmes dont dépend la stabilité du pays. L'histoire se répète, et le présent congolais, à l'image du passé zaïrois, semble piégé dans une spirale où la peur des complots, qu'ils soient réels ou fantasmés, lamine les forces vives de l'institution militaire.

Or, comme hier, la conséquence s'impose avec une inéluctable fatalité : tout pouvoir qui s'érige dans l'obsession de l'ennemi intérieur scie lui-même les fondations sur lesquelles repose son autorité.

En érigeant la suspicion en principe de gouvernement, il transforme la cohésion en fracture, la confiance en défiance, et substitue à la force tranquille de la légitimité l'angoisse fébrile d'une domination précaire.

L'État, au lieu d'être la citadelle de la stabilité, devient alors l'arène d'une lutte intestine où l'ombre des complots imaginaires supplante la réalité des devoirs publics. Ainsi, le régime qui croit se préserver par l'élimination de ses propres cadres finit, inexorablement, par s'affaiblir de l'intérieur, victime d'un processus d'autodestruction dont l'histoire n'a cessé de fournir de funestes exemples.

Mobutu avait affaibli son armée au point de la rendre incapable de défendre l'intégrité nationale face aux rébellions successives ; Tshisekedi, en empruntant le même sentier de suspicion, risque de livrer la République à l'instabilité chronique et au délitement de son appareil sécuritaire.

La peur, désormais, gouverne à la place de la raison d'État. Et comme l'enseigne l'histoire, aucun régime n'a survécu durablement à cette logique délétère où la paranoïa se substitue à la politique, et où le pouvoir en vient à craindre jusqu'à sa propre ombre.

Ainsi, les procès se multiplient en RDC, expéditifs, drapés dans l'apparence d'une justice implacable mais vidés de leur substance juridique

Tite Gatabazi



Source : https://fr.igihe.com/La-paranoia-et-la-derive-repressive-au-sommet-du-pouvoir-congolais.html

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