
Opposant les Forces armées soudanaises placées sous l'autorité du général Abdel Fattah al-Burhan aux Forces de soutien rapide (FSR), commandées par le général Mohamed Hamdan Dagalo, dit Hemedti, ce conflit oppose deux fractions militaires aux ambitions irréconciliables, chacune prétendant incarner la légitimité souveraine.
Or, malgré l'intensité des combats et l'ampleur des destructions, la ligne de front demeure presque inchangée depuis les premiers affrontements. Le Soudan apparaît aujourd'hui comme un État de facto scindé : l'armée régulière, réfugiée dans la ville portuaire stratégique de Port-Soudan, conserve son emprise sur l'ouest et le sud-ouest du territoire national, tandis que les paramilitaires des FSR maintiennent leur autorité sur les provinces orientales, en particulier la région meurtrie du Darfour et une portion du sud-est.
L'implosion silencieuse d'un État : la chute de Khartoum et le retour symbolique du pouvoir
Malgré cette impasse militaire apparente, quelques percées stratégiques ont récemment été enregistrées. L'armée gouvernementale, après une série de campagnes laborieuses, a pu reconquérir l'État d'al-Jazira territoire agricole d'une importance capitale, surnommé à juste titre le grenier à blé du pays.
Mais c'est surtout la reprise, en mars 2025, de l'ensemble de la capitale Khartoum qui marque un tournant majeur. Depuis le début du conflit, la ville s'était muée en un champ de ruines où s'étaient retranchés les deux camps dans une lutte sans merci, réduisant cette cité historique au silence et à la désolation.
La reconquête de Khartoum, bien que revêtue d'une signification politique forte, s'est accompagnée de conséquences sanitaires dramatiques. Une épidémie de choléra, conséquence directe de l'effondrement des infrastructures et de l'hygiène publique, s'est abattue sur la population civile, aggravant le martyre d'une ville déjà brisée par la guerre.
L'exil comme horizon : quatre millions de réfugiés et l'épuisement de l'humanitaire
Le coût humain de cette guerre prolongée atteint désormais des proportions vertigineuses. Plus de quatre millions de Soudanais ont été contraints de fuir leur pays, franchissant les frontières dans des conditions souvent précaires, au péril de leur vie. Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés a qualifié ce chiffre, lors d'une conférence de presse tenue le 3 juin 2025, de " jalon dévastateur dans la plus grave crise de déplacement de population au monde ".
Face à cet exode massif, les pays frontaliers notamment l'Égypte peinent à faire face à l'afflux de réfugiés. En mars 2025, le bureau du HCR en Égypte, confronté à une paralysie logistique et à des restrictions budgétaires drastiques, a été contraint de suspendre tous ses programmes d'assistance médicale. Cette décision tragique illustre l'asphyxie croissante des mécanismes internationaux de solidarité, impuissants face à l'ampleur du désastre soudanais.

Tite Gatabazi
Source : https://fr.igihe.com/Le-Soudan-ou-une-guerre-interminable-et-une-nation-morcelee.html