
A raison, le diplomate rwandais M. Robert Kayinamura rappelait récemment, dans une déclaration de haute tenue prononcée à la tribune du conseil de sécurité des nations unies, que " divertir ou légitimer les FDLR, même tacitement, prolonge le conflit et déstabilise davantage la région ".
Cette sentence lapidaire et ferme traduit un impératif de lucidité stratégique et morale que toute puissance soucieuse de la paix véritable devrait adopter sans réserve.
Un résidu idéologique toxique
Les FDLR, résurgence avérée des forces génocidaires qui ensanglantèrent le Rwanda en 1994, ne sont pas de simples acteurs irréguliers dans un paysage sécuritaire chaotique. Elles incarnent, de manière assumée et persistante, l'idéologie extrémiste qui justifia l'extermination systématique de plus d'un million de Tutsis au Rwanda.
La seule tolérance passive, et a fortiori toute forme d'alliance ou de complaisance à leur égard, revient à perpétuer un négationnisme rampant et à encourager les tenants d'une lecture ethno-suprémaciste de l'histoire et des rapports sociaux.
Les FDLR portent en leur sein, comme un ferment de discorde, une vision du monde fondée sur l'exclusion, la violence et la réécriture cynique de la mémoire collective.
Un danger militaire constant
Sur le plan militaire, les FDLR constituent une menace persistante et insidieuse. Disposant de bases retranchées dans les zones difficiles d'accès de l'Est de la République Démocratique du Congo, recevant des renfort en munitions et en argent des FARDC ainsi que d'autres sources étrangères, ce groupe armé entretient un climat de terreur dans les communautés rurales, usant de violences sexuelles, de pillages et d'assassinats ciblés comme instruments de domination.
Leur modus operandi repose sur la terreur organisée et la stratégie de déstabilisation permanente, empêchant la pacification durable de régions entières, entravant les actions humanitaires et freinant les efforts de développement socio-économique.
Leur implication dans des alliances de circonstance avec d'autres groupes armés locaux ou des milices transfrontalières ne fait qu'accroître leur nuisance stratégique, complexifiant la résolution des conflits et prolongeant un état d'insécurité chronique dont les populations civiles demeurent les premières victimes. Toute permissivité à leur endroit, qu'elle soit diplomatique, militaire ou médiatique, revient à avaliser une logique de guerre asymétrique perpétuelle.
Un facteur de déstabilisation régionale
À l'échelle régionale, les FDLR agissent en véritables catalyseurs de tensions interétatiques et communautaires. Leur instrumentalisation par certains acteurs nationaux ou extérieurs, mus par des intérêts obscurs ou des ambitions géopolitiques à courte vue, contribue à entretenir un climat de suspicion généralisée et à compromettre les initiatives de coopération régionales pourtant essentielles pour la prospérité commune.
Leur existence alimente les discours revanchards, justifie des interventions militaires récurrentes et empêche l'établissement d'une architecture sécuritaire crédible et inclusive dans les Grands Lacs. Laisser prospérer, ou pire, accorder la moindre légitimité politique à ce résidu criminel revient à condamner la région à demeurer un foyer d'instabilité structurelle et à hypothéquer toute perspective de réconciliation authentique.
Le devoir moral et historique des nations responsables
Il apparaît dès lors évident que la seule position tenable pour toute nation et toute institution se réclamant des principes du droit international et des valeurs universelles est celle d'une condamnation claire et sans ambiguïté de l'existence et des activités des FDLR.
Collaborer, pactiser ou même entretenir des relations de convenance avec cette organisation revient non seulement à trahir la mémoire des victimes du génocide contre les tutsis, mais aussi à compromettre l'avenir d'une région entière aspirant légitimement à la paix et au développement.
Le Rwanda, par la voix de ses représentants, n'a de cesse d'appeler à cette vigilance morale et politique. Comme le soulignait avec justesse M. Kayinamura, c'est dans la concertation lucide et dans l'engagement résolu de tous les partenaires régionaux et internationaux qu'il sera possible de transformer les Grands Lacs en une zone de paix durable, débarrassée des ultimes séquelles de l'idéologie de mort et des forces qui en demeurent les tristes vecteurs.
Il faut en finir avec l'illusion dangereuse selon laquelle certains groupes armés pourraient être des leviers utiles dans des jeux d'équilibre locaux. Les FDLR, par leur nature même et leur histoire sanglante, sont et resteront des obstacles irréconciliables à toute paix véritable.
Le temps n'est plus aux demi-mesures ni aux silences complices. La région des Grands Lacs mérite, à la hauteur de son potentiel humain et économique, un avenir enfin affranchi des scories du génocide contre les tutsis et des résurgences obscurantistes.

Tite Gatabazi
Source : https://fr.igihe.com/Les-alliances-avec-les-FDLR-destabilisent-toute-la-region.html