Evariste Ndayishimiye : Un chef d'État en quête de bouc émissaire #rwanda #RwOT

webrwanda
0

La sortie qui a particulièrement défrayé la chronique est celle accordée à la BBC fin mars, au cours de laquelle il a affirmé détenir des " informations fiables " selon lesquelles le Rwanda préparerait une attaque contre le Burundi. " S'ils veulent atteindre Bujumbura en passant par la République démocratique du Congo, pour nous, atteindre Kigali via Kirundo n'est pas non plus compliqué. " Il a-t-il ajouté.

Le Rwanda serait-il devenu le cauchemar éveillé de Ndayishimiye ? Ou s'agit-il simplement d'une stratégie politique qu'il est seul à comprendre ? Ce qui est certain, c'est qu'il n'y a actuellement aucune guerre entre le Rwanda et le Burundi. Mais comme le dit l'adage, " il n'y a pas de fumée sans feu ".

Pour de nombreux analystes de la politique régionale, les accusations répétées de Ndayishimiye envers le Rwanda traduisent surtout une crainte de répercussions de son engagement militaire aux côtés de Félix Tshisekedi, dans la guerre qui fait rage à l'Est de la RDC. Le président burundais s'est en effet aligné sur la même ligne que son homologue congolais, avec lequel il partage depuis des années une hostilité envers Kigali, affirmant même vouloir renverser le pouvoir en place à Kigali.

Ndayishimiye troque la vie de civils innocents contre des dollars

Le choix de Ndayishimiye de soutenir militairement les forces de Tshisekedi contre les rebelles de l'AFC/M23 a été largement critiqué, y compris au sein de son propre pays, aussi bien par des figures politiques que par de hauts gradés de l'armée burundaise.

Son implication repose non seulement sur une idéologie anti-Tutsi, mais aussi sur la propagande congolaise qui présente le M23 comme un groupe de Tutsi rwandophones cherchant à s'emparer de l'Est de la RDC. Or, cette rhétorique des 'étrangers dans leur propre pays' est précisément celle qui, depuis 1996, a poussé les Congolais rwandophones à prendre les armes pour se défendre face aux massacres, aux incendies de maisons, au pillage de leurs troupeaux, aux années passées dans des camps de réfugiés, tandis que l'État congolais demeurait passif.

Selon les observations, le M23, qui revendique aujourd'hui le droit des populations locales s'est engagé dans la lutte armée pour stopper les violences perpétrées par Kinshasa.

L'autre motivation de Ndayishimiye semble bien être financière : il recevrait des paiements de Tshisekedi proportionnels à l'intensité du conflit. Résoudre ce conflit par des moyens pacifiques serait pour lui une perte sèche.

La décision d'envoyer près de 20 000 soldats burundais dans le but de soutenir les forces congolaises dans la lutte contre l'AFC/M23 a profondément choqué l'opinion publique burundaise. Beaucoup s'interrogent sur la raison d'un tel engagement dans un conflit qui ne les concerne pas directement.

Qu'il s'agisse des soldats déployés en RDC, de ceux restés au pays, de leurs familles, de membres du gouvernement ou même de cadres du CNDD-FDD, parti au pouvoir, nombreux sont ceux qui désapprouvent cette orientation. La fronde contre Ndayishimiye ne cesse de s'intensifier à l'approche de l'élection présidentielle de mai 2027, à laquelle il compte briguer un nouveau mandat.

Face à l'hémorragie de déserteurs sur le front congolais, Ndayishimiye a dépêché les Imbonerakure dans le territoire d'Uvira, avec pour mission, traquer et exécuter les soldats burundais ayant tenté de fuir les combats. Ces miliciens agissent désormais comme les sinistres Interahamwe du Rwanda à l'époque de Habyarimana.

Pendant ce temps, le Burundi est plongé dans une profonde crise économique, marquée par un chômage endémique, des pénuries de carburant, de sucre et de devises étrangères. Ndayishimiye semble miser toute sa stratégie sur l'alliance avec Tshisekedi, espérant en retour continuer de percevoir des compensations en dollars.

Les attaques du RED-Tabara : un révélateur de l'impuissance militaire

Le 22 décembre 2023, le groupe rebelle RED-Tabara a lancé une attaque dans la zone de Gatumba, province de Bujumbura, à proximité de la frontière avec la RDC. Le groupe a affirmé avoir tué neuf soldats burundais et un policier. Le gouvernement burundais, lui, a parlé de 20 civils tués, dont un bébé de cinq mois et des femmes enceintes.

En février 2024, RED-Tabara a revendiqué de nouvelles attaques, notamment contre les bureaux du CNDD-FDD à Buringa, et contre des positions militaires dans les zones de Mpanda et " Kwa Ndombolo " en commune de Buringa.

Ces attaques ont mis en lumière l'incapacité du régime à protéger ses citoyens, malgré la présence des troupes burundaises dans le Sud-Kivu depuis 2021, prétendument pour y combattre le RED-Tabara.

Or, selon plusieurs rapports, dont ceux des Nations unies, ces troupes se seraient peu engagées dans la lutte contre le M23. Elles seraient plutôt impliquées dans l'exploitation illégale d'or, ainsi que dans des opérations conjointes avec des milices Maï-Maï contre le groupe Twirwaneho, connu pour défendre la communauté banyamulenge.

Dans ces conditions, difficile pour les habitants de Mabayi â€" localité frontalière de la forêt de Kibira, voisine de celle de Nyungwe au Rwanda â€" de dormir sur leurs deux oreilles, pendant que leur président s'époumone à menacer un voisin avec lequel il n'est même pas en guerre.

Une diversion pour masquer l'échec

Au lieu de se consacrer à la sécurité des Burundais, Ndayishimiye s'acharne sur le Rwanda, n'hésitant pas à invoquer des références bibliques pour justifier ses diatribes. À l'inverse, lorsque le président Paul Kagame affirme que les Rwandais peuvent " dormir en paix ", ce n'est pas une formule rhétorique : c'est l'expression concrète d'un leadership assumé.

Menacer de mobiliser la population pour aller se battre contre le Rwanda, alors qu'il n'existe aucune guerre entre les deux pays, révèle la faiblesse d'un président qui a trahi la confiance de son peuple, en l'isolant au lieu de promouvoir l'intégration régionale et les échanges transfrontaliers.

Cette obsession du Rwanda trahit en réalité une profonde anxiété. Ndayishimiye est conscient que ses choix, hasardeux et non concertés, l'ont placé dans une impasse.

Il sait aussi que, malgré la présence de ses troupes en RDC depuis quatre ans sous prétexte de lutter contre RED-Tabara, leur véritable impact est nul. Ces troupes sont plutôt accusées de crimes de guerre, notamment contre les Banyamulenge.

La stratégie consistant à accuser le Rwanda est une vieille ficelle déjà usée par son " ami " Tshisekedi, qui, après l'avoir longtemps diabolisé, en vient aujourd'hui à accepter l'idée de négociations avec l'AFC/M23 qu'il qualifiait jadis de groupe terroriste.

Le Rwanda, la menace imaginaire ?

Si le Rwanda n'a pas attaqué le Burundi lorsque des éléments du FLN ont mené des incursions armées depuis la forêt de Kibira via Nyungwe, pourquoi le ferait-il aujourd'hui ? Qu'est-ce qui justifie, à présent, les menaces infondées brandies par Ndayishimiye ?

La sagesse voudrait qu'il s'attaque d'abord aux problèmes internes de son pays au lieu de chercher un bouc émissaire. Le président burundais ferait mieux de retirer ses troupes du conflit en RDC soutenir sincèrement le processus de dialogue récemment relancé entre le Rwanda et le Burundi.

Le Rwanda sait mieux que quiconque dans la région ce que signifient la paix, le prix qu'elle exige, et les ravages causés par la guerre et la haine ethnique. Il n'a aucun intérêt à engager un conflit avec le Burundi, d'autant qu'aucun motif sérieux ne le justifie.

Evariste Ndayishimiye apparaît comme un chef d'État en quête de bouc émissaire, détournant l'attention des problèmes internes de son pays

IGIHE



Source : https://fr.igihe.com/Evariste-Ndayishimiye-Un-chef-d-Etat-en-quete-de-bouc-emissaire.html

Enregistrer un commentaire

0Commentaires

Enregistrer un commentaire (0)