A en croire la communication officielle, cette mesure s'inscrirait dans la mise en uvre scrupuleuse de l'Accord de Washington du 27 juin 2025, pierre angulaire censée formaliser l'engagement du gouvernement congolais à neutraliser ce mouvement génocidaire dont la seule existence contredit toute prétention de souveraineté apaisée et de responsabilité régionale.
Or, la précision s'arrête là : aucun calendrier n'est avancé, aucun dispositif opérationnel détaillé, aucun mécanisme de vérification ne vient attester de la sincérité de cette initiative. L'annonce sonne davantage comme une posture, une gesticulation diplomatique destinée à rassurer l'opinion internationale que comme la manifestation d'une volonté politique ferme de démanteler un acteur auquel les FARDC demeurent, depuis des années, viscéralement arrimées.
La réaction du lieutenant-colonel Mutimura, porte-parole des FDLR-FOCA, achève d'ébranler la narrative officielle congolaise : en rejetant catégoriquement toute perspective de désarmement, en justifiant la lutte armée par la prétendue protection des réfugiés rwandais et en posant comme conditions un improbable dialogue inter-rwandais et un retour " en dignité ", il rappelle par sa seule existence l'inanité des dénégations répétées de Kinshasa quant au rôle continu des FDLR.
Qu'un mouvement qualifié d'inexistant ou de marginal par les autorités congolaises se révèle suffisamment structuré pour disposer d'un porte-parole, d'une stratégie politique et d'une capacité de résistance revendiquée en dit long. Dont acte.
La colonne vertébrale occultée : une alliance inavouable, mais indéfectible
La menace d'une opération militaire conjointe censée peser sur les FDLR n'effraie guère ceux-ci, tant ils connaissent l'ampleur des ambivalences qui traversent l'appareil sécuritaire congolais. En affirmant qu'ils " résisteront ", ils ne font que mettre en lumière une vérité que nul observateur sérieux ne conteste plus : les FARDC ne sont pas au bout de leur peine, car elles demeurent incapables de se défaire de ce qui constitue depuis longtemps leur colonne vertébrale opérationnelle, à savoir l'appui constant, organique et structurel des FDLR.
Cette dépendance, patiemment tissée au fil des années, excède la simple alliance de circonstance. Elle est devenue, pour une partie de l'armée congolaise, un ressort interne de puissance, une ressource stratégique, voire une béquille indispensable dans les opérations.
La rhétorique officielle, fluctuante au point d'en devenir météorique, ne parvient plus à masquer cette réalité : tantôt les FDLR seraient dissoutes, tantôt disséminées, tantôt marginales, tantôt inexistantes. Pourtant, elles réapparaissent avec l'éloquence implacable des faits, en armes, en discours et en posture stratégique.
Chercher à les neutraliser sans briser cette dépendance revient à tenter de se défaire d'une ombre sans toucher au corps qui la projette. Tant que Kinshasa refusera de reconnaître la nature intime de cette alliance, tant qu'elle persistera à manier le double langage comme levier politique, aucun accord, fût-il signé à Washington, ne pourra produire autre chose que des promesses ajournées et des engagements dérisoires.
Ainsi se dessine l'impasse congolaise : une guerre menée contre ses propres auxiliaires, un ennemi proclamé qui demeure l'un de ses atouts, et un discours diplomatique qui vacille sous le poids de ses propres contradictions.
Tite Gatabazi
Source : https://fr.igihe.com/La-RDC-entre-affichage-diplomatique-et-contradictions-structurelles.html